Entre pénurie de logements locatifs, baisse des prix de l’immobilier ancien et perspectives de reprise, le marché immobilier français traverse une période charnière. Alors que les professionnels du secteur alertent sur la crise locative, les signes d’amélioration des transactions et des conditions de financement laissent entrevoir un regain d’activité en 2025.
La crise du logement locatif inquiète les experts.
« La crise de l’immobilier est derrière nous, mais la crise du logement est devant nous. » C’est par ces mots que Loïc Cantin, président de la Fédération nationale de l’immobilier (Fnaim), a dressé un constat alarmant sur le marché locatif. Selon lui, les années 2023 et 2024 ont été particulièrement difficiles, notamment pour les jeunes. Un sondage OpinionWay révèle que 17 % des 18-24 ans ont renoncé à leurs études à cause du coût des logements.
Les chiffres confirment cette pression : les mandats de gestion locative ont chuté de 30 % en trois ans. L’essor des plateformes de location courte durée, comme Airbnb, aggrave la situation. Selon Eurostat, le nombre de nuitées sur ces plateformes a bondi de 86 % en cinq ans, faisant de la France le premier marché européen dans ce domaine. Par ailleurs, la transformation de logements vides en meublés continue de progresser, passant de 9 % à 14 % entre 2006 et 2021.
Un contexte économique qui freine l’offre locative.
La hausse des taux d’intérêt et la diminution du pouvoir d’achat immobilier des ménages ont paralysé le marché. Les transactions dans l’immobilier ancien devraient atteindre 775 000 en 2024, en recul de 11 % par rapport à 2023 et de 36 % par rapport à 2021. Cette tendance limite les opportunités pour les locataires, tandis que de nouvelles contraintes, comme l’interdiction de louer des passoires thermiques depuis janvier 2023, compliquent encore la donne. « Il y a urgence à évaluer l’efficacité des dispositifs comme l ‘encadrement des loyers », alerte Loïc Cantin, critiquant leur impact limité dans des villes comme Paris ou Lille.
Un marché immobilier ancien en quête de stabilisation.
Après un ralentissement marqué en 2023, le marché immobilier ancien montre des signes de reprise progressive. La baisse des prix entamée depuis plusieurs années se poursuit dans de nombreuses villes françaises. À Grenoble, par exemple, le prix moyen au mètre carré a diminué de 2 % sur un an, atteignant désormais 2 549 euros/m². À Lyon, la chute est encore plus marquée : -13,5 % en deux ans, avec un prix moyen de 4 397 euros/m² en janvier 2025.
En revanche, certaines villes moyennes comme Dunkerque et Calais enregistrent des hausses significatives des prix, respectivement de +7,4 % et +12,6 %. Ces disparités mettent en lumière des dynamiques locales complexes, où la demande reste déterminante. Selon le réseau Laforêt, le nombre de transactions a progressé de 7 % à l’échelle nationale en 2024, un frémissement attribué à la baisse progressive des taux d’intérêt.
Des perspectives plus favorables pour 2025.
Les experts anticipent une amélioration des conditions de financement en 2025, avec des taux d’intérêt prévus autour de 3 % d’ici l’été. Gabriel Pacheco, président de Safti, estime que cette tendance pourrait porter le volume des transactions à 850 000 en 2025, contre 800 000 en 2024. La Banque de France évoque même des taux proches de 2 % à l’horizon de la rentrée prochaine, ce qui stimulerait davantage le marché.
Malgré ces signaux encourageants, les primo-accédants continuent de faire face à des obstacles, notamment pour constituer un apport personnel. En 2024, ils ne représentaient que 31 % des acheteurs, un chiffre en baisse par rapport aux années précédentes.
Le marché locatif sous pression.
Tandis que les acheteurs bénéficient de conditions légèrement améliorées, les locataires, eux, subissent une tension accrue. Les loyers continuent d’augmenter dans la majorité des villes françaises. À Angers et Marseille, les hausses atteignent respectivement 11 %, tandis que Toulon et Nice enregistrent des augmentations de 7,5 % et 6 %. À Grenoble, le loyer moyen au mètre carré pour les appartements a progressé de 2,3 % en un an, s’établissant à 13,4 euros/m². Ces chiffres reflètent une pression locative persistante, alimentée par la faiblesse de l’offre et des conditions économiques difficiles pour les ménages locataires.
À Paris, cependant, la tendance est inversée avec une baisse des loyers de 4,2 % sur un an, tandis que Calais enregistre une diminution spectaculaire de 11 %. Ces exceptions restent rares et ne suffisent pas à compenser une tendance nationale à la hausse, qui pèse de plus en plus lourd sur les budgets des locataires.
Une année 2025 sous le signe du renouveau ?
Malgré les défis actuels, plusieurs signaux laissent espérer une reprise plus marquée en 2025. La stabilisation des prix de l’immobilier constatée en 2024 (+0,4 % au niveau national) pourrait se poursuivre, soutenue par une légère hausse des revenus et une baisse des taux d’intérêt. Selon les prévisions, ces améliorations devraient permettre aux ménages d’accéder à des surfaces plus grandes, avec un pouvoir d’achat immobilier en augmentation de 5 m² en moyenne sur un an.
Les investisseurs, quant à eux, trouvent à nouveau des opportunités intéressantes dans un marché en pleine correction. La pierre redevient une classe d’actifs à considérer, notamment pour ceux cherchant à profiter des rendements locatifs attractifs dans certaines villes comme Grenoble, où le rendement locatif brut atteint 6,3 % au 1er janvier 2025.
Enfin, les professionnels du secteur, comme le groupe Safti, affichent leur optimisme. Avec une pré vision d’une croissance en volume de 15 % pour les transactions immobilières en 2025, et des prix moyens en légère progression (+1 %), le marché semble prêt à rebondir. La baisse attendue des taux d’intérêt, combinée à une reprise progressive de l’économie, pourrait bien marquer la fin de trois années de recul historique pour l’immobilier ancien.
Malgré ces perspectives encourageantes, des défis demeurent, notamment pour les locataires et les primo-accédants. La pression sur le parc locatif, les contraintes réglementaires, et les disparités régionales continueront de façonner les dynamiques du marché immobilier français. Reste à voir si les mesures gouvernementales et les évolutions économiques permettront d’insuffler un véritable renouveau à ce secteur en mutation.